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Après le coronavirus, préparons-nous à muter !

Les marchés de l’emploi s’effondrent. L’incertitude est à son comble. Le coronavirus nous pousse à muter professionnellement. Nos emplois, nos revenus et nos entreprises sont entrés dans une zone de turbulences inédites. Quel sera notre futur professionnel après le coronavirus ? Comment des millions de travailleurs peuvent-ils se réorienter ? Se reconvertir ou se requalifier ? Comment trouver un emploi pendant une crise économique d’une magnitude inégalée ? Enfin, quelles compétences les emplois du futur exigeront-ils ?

En discutant dans les derniers jours avec mes amis qui ont perdu leurs emplois ou leurs contrats, un sentiment de vertige et une profonde remise en question nous assaillent. Aucun épidémiologiste ni économiste n’a de boule de crystal pour nous dire comment l’économie va reprendre.

Je me risque toutefois à vous partager ici quatre scénarios et dix pistes pour muter.

Les scénarios qui suivent pourront cohabiter à toutes les phases de la crise, quelque soit sa profondeur et sa durée.

Il est temps de se préparer à muter !

Subvenir à nos besoins dans l’urgence

Scénario 1: Dans les prochaines semaines, le taux de chômage pourrait passer par des sommets. Des ménages et des demandeurs d’emploi seront en situation de détresse financière. Nous pourrions décider de prendre des emplois principalement dans des secteurs dits essentiels. En forte tension, certains de ces emplois se revalorisent avec des salaires en légère hausse. Pendant ce temps, les autres emplois (Hôtellerie, Restauration, Arts, Loisirs, Tourisme, Voyage, etc) sont très précaires et pour une durée inconnue. 

1- Misons sur nos compétences transférables

Mon ami Daniel vit à Madrid. Il est guide touristique. Autant vous dire que les touristes ne reviendront pas très vite. Connaissant le domaine du tourisme, de la restauration et du vin, il n’a que peu de chances dans son domaine pour la saison estivale 2020. Pourtant, excellent en service à la clientèle, parlant trois langues et à l’aise en logiciels bureautiques, ce débrouillard pourrait s’orienter vers les centres de contact client. Les centres d’appel clients continuent à recruter. Ils offrent même pour certains des salaires et des avantages sociaux à la hausse.

Avec les compétences transversales, des milliers de talents pourraient muter vers des secteurs qui reprennent plus vite (au détriment presque fatal du secteur à l’arrêt). Pour être transférables, il faut reconnaître ses capacités transversales et enfin il faut le vouloir (Intérêts professionnels x Coûts d’opportunité). Rien ne remplace un temps de bilan de compétences à cette étape. Ensuite, nous devons activer notre réseau de contacts pour mobiliser nos ressources et saisir des opportunités.

Beaucoup de consultants et de travailleurs indépendants, des commerçants et des restaurateurs auront à faire une réflexion rapide sur leurs compétences transférables. Ils doivent considérer leur avenir à court terme dans des secteurs connexes, des métiers utilisant leurs compétences transférables ou des mandats proches.

2- Migrons vers les emplois les plus proches… géographiquement

Les postes peu qualifiés de chauffeurs-livreurs, les manutentionnaires d’entrepôts, d’agent en centre d’appel, le personnel de services aux personnes âgées et d’entretien ménagé, les travailleurs agricoles et bien d’autres sont depuis longtemps très demandés.

Dans l’urgence, la clé pour une adéquation rapide entre l’offre et la demande, c’est la localisation géographique. Plus l’emploi est proche ou plus il est facile de s’y rendre, plus ces jobs seront rapidement comblés.

Après la distanciation sociale, la proximité d’emploi sera une valeur en hausse. Il se pourrait même que nos emplois se fassent à domicile et en télétravail. Cela pourrait devenir un critère d’attraction des talents et une grande tendance en décoration 2020 !

3- Testons un autre secteur ou des entreprises

Dans l’hypothèse toujours d’un chômage de masse, les emplois peu qualifiés dits essentiels peuvent aussi s’ouvrir à des profils plus atypiques. En temps normal, l’offre et la demande d’emploi reposent sur des exigences mutuelles et des représentations sociales qui segmentent à outrance le marché de l’emploi (chômage frictionnel). Mais devant une pandémie et un taux de chômage à deux chiffres, nécessité fait loi.

Pour certains profils plus qualifiés et moins habitués à des emplois manuels, ces emplois demeurent très souvent un second choix. Ils peuvent toutefois nous rapprocher d’entreprises qui demeurent actives. Ces « cellules » peuvent vous faire entrer par la petite porte. Cette stratégie d’introduction dans l’organisme vivant est très efficace.

Mon amie Anastasia est acrobate et artiste. Son emploi n’existe plus. Les spectacles sont annulés jusqu’en Décembre 2020 et peut-être que la compagnie va tout simplement fermer. Elle a peu de chance de retrouver un emploi dans un secteur en déroute. L’éducation des enfants l’a toujours attiré. Elle se rapproche actuellement des plateformes d’aide scolaire en ligne qui offrent des emplois à distance. Elle donne quelques heures de cours de soutien à des enfants et à des migrants. Pas assez pour vivre mais juste assez pour se faire connaître et valider son projet professionnel. Elle continuera de s’entraîner chez elle dans l’éventualité d’une reprise.

Se sentir utile

Scénario 2: A moins d’un antidote puissant et rapide, le choc économique va étouffer beaucoup de nos rêves. Il va aussi en faire naître de nouveaux qui étaient en sommeil. Dans cette période de chaos, les repères sont perdus. Nos esprits s’agitent ou s’endorment devant Netflix. Nos plans pro se brisent. Mais le vide et le confinement poussent à penser à soi et à nos aspirations. Pour beaucoup, la question de l’utilité se pose. En quoi mon emploi et mes compétences sont au service d’un bien commun ?

4- Faisons appel à notre sens du devoir

Si vous n’êtes pas dans l’urgence de payer votre loyer, il est possible de se rendre utile pour aider des associations. Dans un contexte d’urgence, tout est possible.

Certain(e)s stylistes de mode et de couturier.ères cousent des masques et des blouses. Peut-être aiderez-vous un ami artisan ou entrepreneur pendant quelques semaines ?

Je me suis inscrit comme bénévole pour l’association de prévention du suicide de Montréal. Tant qu’à ne rien faire (si cela m’arrive), autant mettre mon temps au service des autres et mettre mes compétences de psychologue au service de la communauté.

5- Entrons dans une quête de sens

Certains d’entre nous sont très sensibles au sens qu’ils peuvent donner à leur action. Une conscience sociale et du sens pour soi s’expriment. N’est-ce pas là la source d’une motivation continue et d’un engagement profond ?

C’est le moment de tester des activités que nous aurions aimé faire sans jamais oser passer à l’action.

C’est le moment de faire le bilan de nos intérêts, de nos motivations et de notre environnement social et économique proche. Nous pouvons y jouer un autre rôle : bénévole, entrepreneur(e), militant(e) ou salarié(e). Les grandes crises vont dérailler des trajectoires et naître des vocations.

Renforcer notre employabilité. Une autre forme d’immunité !

Scénario 3: Si la pandémie n’est pour certains d’entre-nous qu’un long congé en famille, vous êtes chanceux. Et vous le savez ! Si nous conservons notre emploi ou si nous avons  une forte probabilité de retrouver un emploi dans le même domaine, ce n’est toutefois pas le moment de s’endormir sous notre masque N95. Soyons judicieux en ajoutant des compétences à notre jeu de la prochaine économie. Une économie numérique, en filière courte, hautement collaborative et sociale.

6- Gagnons en résilience avec des compétences numériques

Observons comment nos métiers se prolongent avec le numérique. Ils nous montrent le chemin.

Mon frère Romain est acheteur sommelier pour un grand restaurant à Londres. Il a été licencié économique le 16 mars. Fin connaisseur des producteurs de vins sur les cinq continents, il est habitué au service en salle et au management. Il compte retrouver un emploi dans un secteur qu’il aime mais il ne sait pas quand. Après quelques discussions, nous nous sommes dit que ses compétences en commerce en ligne se marieraient parfaitement avec son grand portefeuille de fournisseurs et de clients. Ces plateformes de eCommerce se multiplient. Les volumes de ventes en ligne ne cessent d’augmenter. Demain, il pourrait gérer en ligne sa boutique ou faire tourner le stock qui prend de la valeur au restaurant.

7- Exerçons notre polyvalence et donc notre plein potentiel

Nous combinerons tous un métier avec de nouveaux outils et parfois de nouveaux emplois.

Le marketing, les communications, les ventes, le design, la télémédecine, tous ces métiers embarquent une grande dose de numérique. Le phénomène ne fait que s’accélérer pour travailler autrement (outils) mais aussi pour revoir le modèle économique et commercial.

J’essaye de convaincre ma coiffeuse et mon dentiste depuis quelques semaines d’ouvrir une page web pour prendre les rendez-vous et payer en ligne via les smartphones des clients. Cela économiserait bien des étapes, améliorerait l’expérience (voir les plages disponibles) et réduirait les contacts physiques ! J’attends la réouverture pour voir leurs têtes… (et la mienne 🤠).

De l’imprimante 3D au commerce en ligne, il y a de tout pour augmenter notre polyvalence et notre littératie numérique. Le bouillon de culture pour la nouvelle économie est là. Les sites YouTube et les MOOC se multiplient. Les universités et les écoles basculent en classe virtuelle et en eLearning. Des micro-certificats dans tous les domaines du numérique prolifèrent.

Muter avec les MOOC (exemple de MOOC à travers le monde)

Muter avec les MOOC (exemples de MOOC à travers le monde)


Muter pour le futur

Scénario 4: Finalement, le Coronavirus aura été un accélérateur implacable. Avec le confinement, il scinde immédiatement les essentiels des non-essentiels. Mais au redémarrage, il va segmenter ceux qui parmi nous maximisent les technologies de ceux qui ont sous-investit. Il va aussi sanctionner, sans état d’âme ceux, ceux qui n’ont ni diversifier leurs canaux de distribution ni varier leurs sources de revenus. La résilience des organisations va être au cœur des stratégies d’entreprise. Et pour des millions d’entre-nous, la question de la résilience professionnelle se pose cruellement aussi. Mutons !

8- L’économie 4.0 en intraveineuse 

Les capteurs, les traceurs, les robots, les automatisations de processus, les paiements à distance et sans contact, les imprimantes 3D, l’Intelligence artificielle, l’analytique en temps réel, les chatbots, les sites eCommerce, les nouveaux médias, le SEO-SEM, les languages informatique, le web-design, etc. etc. etc.

La transformation des talents est en marche. N’attendons pas trop que les entreprises nous y préparent.

Comme le montre la futuriste Amy Webb, la technologie est une couche imbriquée dans TOUS les grands perturbateurs qu’elle décrit ci-dessous (dans son article du MITSloan Review de mars 2020). Les technologies ne sont pas la destination mais un moyen.

Muter - Amy Webb_MIT Sloan _The 11 Sources of Disruption Every Company Must Monitor

Muter – Amy Webb_MIT Sloan _The 11 Sources of Disruption Every Company Must Monitor


9- La communauté séquence votre ADN

Les filières courtes, les approvisionnements fiables et durables mais aussi les collaborations étroites et les entreprises en réseau sont les gages d’une économie plus résiliente. La mission des entreprises et leur « Total Societal Impact » va teinter toutes les initiatives d’affaires, le marketing et la publicité.

Pour retrouver un emploi mais aussi pour tisser des liens, le réseau social, encore plus après la mise en confinement, est un actif intangible qu’il faut entretenir.

10- Demain, pour survivre en milieu hostile il faudra être un optimiseur d’efficience ET d’expérience

Enfin, je crois profondément que demain, pour payer la dette de cette pandémie et la dette accumulée pour les générations futures, nos économies, nos organisations et nous-mêmes nous devrons être beaucoup plus efficients.

Les entreprises vont entrer dans des phases combinées de fusions-acquisitions, de restructurations, de partenariats et d’alliances et enfin de transformation numérique, organisationnelle et sociale.

Demain, s’ouvrira un vaste chantier dans lequel nous serons impliqués (ou certains ne le seront pas !). Ce chantier est celui de l’automatisation, de la robotisation, de la maximisation des actifs, de la minimisation de l’impact environnement et de la simplification. De nouveaux modèles organisationnels, de nouveaux designs d’expérience et de nouveaux emplois détruiront ce que le coronavirus a rendu obsolète en quelques semaines.

A propos de l’auteur

Jean-Baptiste Audrerie est psychologue organisationnel depuis 25 ans et titulaire d’un Exécutif MBA de l’université Paris-Dauphine. Il aide les Directions Ressources Humaines à apprivoiser les nouvelles capacités technologiques à leur portée. Il les aide à transformer leur modèle de service et les parcours d’expérience des talents. Auteur du blog FutursTalents, il est agit comme analyste des tendances des pratiques innovantes en gestion des talents et en technologies RH.

Des questions, des commentaires ? Le volet ci-dessous est fait pour vous. Je vous répondrai avec plaisir. Vous pouvez aussi me joindre via ce formulaire. Votre entreprise cherche à augmenter sa résilience et son efficience RH dans la Francophonie ? Contactez-moi !

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