top of page

Bâtir la résilience organisationnelle

Vous n’avez peut être pas attendu la fin de la pandémie pour apprendre certaines leçons d’économie et de management. Nous sommes fragiles. Les organisations sont fragiles. Les PME sont très fragiles. Mais on peut travailler la résilience organisationnelle. Voici quatre pistes en cours de discussion avec des clients et des amis pour bâtir une meilleure résilience.

BOOM! Le CORONA.

Le virus a été un révélateur aussi instantané qu’imprévisible. Tout s’est accéléré. Nous avons vieilli de cinq ans en deux mois.

En mois de deux mois, il y a deux types d’organisations: celles qui ont tiré immédiatement avantage du numérique et les autres. Les services qui composent 60 à 70% de nos économies occidentales savent que sans l’ajout du numérique, le dépôt de bilan est la prochaine menace imminente.

En plus du volet technologique, il y a aussi le modèle d’affaires, la gouvernance et le leadership qui sont en question et qui contribuent à la résilience des entreprises.

Ce qui était une évolution lente est devenue une nécessité absolue pour continuer à travailler. Et jamais le concept « Travail du Futur » n’a été aussi concret pour tous, mondialement !

1- Bâtir un canal numérique de revenus additionnels

Le choc a été dur pour les entreprises de services et les intermédiaires. Il a été encore plus dur pour celles qui ont négligé le numérique.

Devenir « Omnichannel », être essentiel ou mourir 

Une pizzeria ferme si elle n’a pas de site de commande, pas de paiement en ligne et aucun service de livraison à domicile. Idem pour la boutique de création de mode. Même sort pour le musée. Bien sûr, il est impossible de couper les cheveux pendant le confinement total. Il est aussi impossible de faire une coupe à distance, même si des robots laveurs de cheveux existent au Japon. Mais hors confinement, même une petite boutique peut améliorer l’expérience client. Est-il possible de prendre un rendez-vous en ligne ? Peut-on procéder à des pré-paiements électroniques ?

Après la consommation de confinement, les ménages continueront plus que jamais de favoriser les achats en ligne, la livraison à domicile ou le « Click-and-Collect ». Les consommateurs traditionnels ont 6 à 8 semaines pour se pratiquer. L’expérience client en ligne fait toute la différence pendant la quarantaine. Et tout le monde peut l’apprécier.

« Consumériser » les services

Les entreprises qui facturent leurs services à l’heure n’ont pas la chance des entreprises plus résilientes qui vendent surtout des abonnements. Elles pourraient, dans une certaine mesure, vouloir accélérer la commercialisation de services numériques pour diversifier et sécuriser leurs revenus.

Les restaurants ont ainsi basculé en moins de quelques jours dans la livraison à domicile, dans le marché des plats préparés dits santé ou encore dans les repas pour personnes âgées. De leur côté, les prestataires de services intellectuels comme les consultants ont l’habitude de transformer leur savoir en livre, en formation à distance ou en franchise quand ils développent un modèle éprouvé.

Il n’est pas facile de passer du modèle tous services à un produit vendu avec abonnement. Mais je crois qu’il est temps d’y réfléchir plus attentivement.

Les grands résilients de cette perturbation mondiale sont les acteurs technologiques. Ce sont les entreprises d’infrastructure en télécommunication et en stockage de données. Ce sont aussi les éditeurs de logiciels de communication et les ERP qui alimentent toutes les opérations des entreprises.

Demain sera encore plus technologique ou ne sera pas.

2- Bâtir des capacités numériques et la culture qui va avec

Le dentiste, le maçon, le technicien de production d’eau potable, le pharmacien, le conducteur de bus ou le chef de production de la boulangerie industrielle ne peuvent travailler sans être présents à leur poste de travail. Toutefois, ils peuvent tous mieux travailler avec certains outils et augmenter leur résilience (sécurité, continuité, revenus).

Numériser les opérations 

Le numérique ne se résume pas au seul télétravail, aux moyens mobiles de communication ou aux outils de collaboration en ligne.

Le numérique s’étend à presque toutes les opérations de tous les secteurs pour aider à renseigner, piloter, mesurer, suivre à distance, contrôler, prendre une décision. De la chaîne d’approvisionnement, en passant par la logistique, de la robotisation en passant par l’automatisation de certains tâches administratives, les entreprises les plus résilientes sont aussi celles qui donnent des outils modernes de travail.

Par exemple, les centres de contact clients (CCC) privilégient encore largement la présence des collaborateurs sur des plateaux techniques sécurisés. En effet, installer un poste de centre d’appel à domicile coûte cher. C’est lourd et assez contraignant en termes de sécurité et de confidentialité. Mais, investir pour adopter le double mode présentiel et  distanciel présente aussi son lot d’avantages:

  1. Continuité des opérations avec un mode hybride

  2. Flexibilité du travail demandée par les travailleurs

  3. Extension du territoire de recrutement des ressources

  4. Partage rapides des processus et des connaissances

Plus que des outils, une culture numérique

Le travail à distance auquel des millions de travailleurs viennent de se convertir en urgence n’est pas parfait. Mais il se gère. Et il est toujours plus socialement bénéfique que pas de travail du tout.

Le confinement vient de briser les derniers remparts organisationnels qui retenaient la généralisation du télétravail à tous les emplois administratifs et de gestion. Certains managers refusaient encore, juste avant le confinement obligatoire que certains employés continuent de travail sans se présenter au poste physique de travail dans l’entreprise. Certains employés de bureau n’avaient même pas de lap-top ou d’accès au serveur pour répondre aux emails ou pour travailler sur les fichiers ou avec les logiciels professionnels.

Au retour du confinement, que pensez-vous que les collaborateurs toujours à l’emploi vont demander à la direction ? Du télétravail. Des outils de télétravail. Un management collaboratif et engageant à l’épreuve de l’incertitude. Une entreprise qui les préparent à vivre (ou survivre) dans un monde nouveau et un marché de l’emploi volatile et exigeant.

Si votre entreprise en a les moyens, elle doit accélérer l’exploration des outils et des modes de travail qui donnent de la souplesse, de l’agilité et une continuité d’opération.

Pour devenir une culture, le numérique doit être expliqué et enseigné. Il doit ensuite porter un projet collectif et individuel. Et enfin, il doit être expérimenté par tous.

3- Repenser les principes de gouvernance

A qui ressemble la résilience d’un pays, d’une région, d’un secteur d’activité ou d’une entreprise ? Si l’on veut continuer à améliorer notre futur, il faut se poser cette question en fonction des différentes catégories de risques.

Que vaut le bien commun quand le risque sanitaire partagé par tous peut hypothéquer l’avenir de la grande majorité des citoyens du monde ? Il faut s’interroger sur l’impact sociétal, environnemental et .

Penser le bien commun, sur le long terme

Au niveau des pouvoirs publics, la question du style de gestion globale des risques sanitaires, socio-économiques et environnementaux va se poser. Nous savons déjà que les États devront revoir les priorités d’investissement pour sécuriser les approvisionnements stratégiques de chacun de leur pays. Le rôle régalien doit s’assurer sur un temps long. Ce temps de la réflexion et de la planification semble se perdre entre chaque échéance électorale. Les fonctionnaires doivent face aux élus pour ériger des principes protecteurs.

Au niveau des entreprises, les clés de décisions des chefs d’entreprises et des actionnaires doivent ajouter à la valeur de l’action les variables d’impact social et environnemental.

Revoir son modèle pour regagner la confiance

Nous expérimentons totalement ce qu’est un environnement VUCA. Cela va laisser des traces dans les esprits. Nous allons changer massivement nos modes de consommation, d’éducation, d’épargne, d’élection politique et nos choix de carrière.

De nouveaux modèles organisationnels ont vu le jour depuis les années 2010 mais sans se généraliser. Encore anecdotiques, certains modèles organisationnels vont offrir des débuts de réponses aux nombreuses remises en question qui s’annoncent.

1- On pense par exemple aux entreprises post-conventionnelles (décentralisées, libérées ou au management partagé).

  1. Il s’appuie sur la communauté, sur l’autonomie et la responsabilisation. Ce modèle favorise l’engagement et l’intelligence collective. Il peut se montrer agile. Mais il parfois long à implanter et il est peut-être moins réactif que le modèle autocratique en temps de crise ponctuelle. Toutefois, en temps de crise systémique et hautement complexe, le décideur (ou l’autocrate) devrait concentrer toutes les qualités et les vertus, ce qui est presque impossible.

2- On peut citer aussi les organisations à mission.

  1. Des entreprises à but lucratif se donnent une finalité sociale et environnementale. Les entreprises socialement responsables durant la crise ont connu un indicateur boursier largement supérieur aux autres. Banque Of America Merrill Lynch a fait une analyse du modèle Environmental, Social and Governance (ESG) qui illustre bien ce que les populations valorisent de plus en plus. Mes cours de MBA sont loins mais le modèle de Archie B. Caroll est toujours un bon exemple. Lire ici l’article In Search Of The Moral Manager de A.B. Carroll qui date de 1987 ! Mais c’est surtout cet article qui devrait vous être utile: The Pyramid of Corporate Social Responsibility: Toward the Moral Management of Organizational Stakeholders (A.B. Carroll – 1991). Il y décrit les niveaux d’une entreprise éco-responsable.

  2. Boston Consulting Group a de son côté développé tout une approche sur le Total Social Impact. Lire ici le guide très complet publié en 2017: Total Social Impact: A New Lens for Strategy

  3. Vos équipes de direction orientent-elles la raison d’être de l’organisation vers ces sujets ?

3- On peut aussi ajouter que les modèles coopératifs et associatifs.

  1. Ils présentent des avantages pour mitiger les risques des organisations à but uniquement lucratif. Proche du modèle des entreprises à mission, ces organisations sont souvent lourdes et lentes à prendre des décisions (jeux politiques) mais peuvent se révéler

4- N’oublions pas les entreprises familiales qui démontrent une croissance continue sur le long terme.

  1. Le tissu économique est largement composé de PME, pour la plupart familiales. Son principale enjeu est la succession familiale.

5- Enfin, il faut mentionner les organisations collaboratives.

  1. Elles travaillent en écosystème ouvert, fortement collaboratif. Ce modèle est très présent dans le domaine de l’innovation et de la recherche, de l’éducation, des technologies ou du développement économique local. Ces dérivés sont bien connus tels que l’Open Source, le Crowd-Funding ou l’Open Innovation. La force de ce modèle est de tisser un réseau de contributeurs complémentaires pour résoudre des problèmes complexes. La qualité des composantes du réseau, la qualité des liens et leur niveau d’interdépendance pourront les aider à développer une résilience organisationnelle.

Résilience organisationnelle: Le modèle Corporate Social Responsibilit CSR ou ESG de A.B. Caroll (1991)

Résilience organisationnelle: Le modèle Corporate Social Responsibility CSR ou ESG de A.B. Caroll (1991)


Retenez que les entreprises les plus résilientes miseront sur la durabilité (Sustainability) des ressources matérielles et immatérielles. Elles s’appuieront davantage sur un écosystèmes d’alliance et de complémentarité. Leurs risques d’approvisionnement seront mitigés en développant des filières courtes (achat local). Une analyse continue des risques sera au centre des comité de direction. Et si les organisations ne peuvent prévoir anticiper tous les « Cygnes Noirs » (The Black Swan de Nassim Nicolas Taleb – 2007), elles peuvent au moins alerter les autres parties prenantes sur les facteurs de résilience.

4- Rebâtir les emplois de 2020

En pleine transformation de l’économie et des emplois, la pandémie va tout accélérer.

Nous assistons à un bouleversement majeur et temporaire de l’économie tertiaire et quaternaire. Au-delà de la montée en flèche du chômage temporaire et des demandeurs d’emploi, il ne faut pas oublier que la nature même du travail est en mutation.

Le nombre de « Gig Workers » et de « Contingent Workers » pourrait se stabiliser.

Les consultants, les pigistes, les freelancers représentent (5 à 40% des emplois selon les pays et les villes). Cela change le visage des demandeurs d’emploi et des aides à l’assurance chômage pour ceux qui n’étaient pas salarié. Le lien d’emploi et le salariat est un modèle moins dominant. Si cela peut aider les entreprises à ajuster leurs effectifs facilement, cela peut aussi leur faire perdre en quelques heures des ressources clés.  Comment allez-vous occuper un poste critique ? Comment allez-vous développer des compétences durables et évolutives si une partie de vos ressources sont contractuelles ? 

Les nouvelles compétences induites par les technologies continueront d’augmenter.

Toutes nos infrastructures et nos outils sont devenus numériques: Télétravail, automatisation, robotisation, block-chain, intelligence artificielle, marketing numérique, Cloud, Analytique, Sécurité informatique, Application mobiles, ERP et autres CRM, AR/VR, etc. Dès lors, le virage n’est plus une option pour les « early-adopters » mais une condition de survie et de résilience pour la majorité. Il faut être branché. Comment allez-vous prioriser, financer et accélérer le développement de la numérisation de votre organisation ? Comment allez-vous former vos collaborateurs à une entreprise connectée, en temps réel et avec de puissants insights ? Quelles compétences et collaborateurs contribuent à votre résilience actuelle et future ?

Une introduction massive de la robotisation et de l’automatisation va bouleverser nos emplois.

La montée en flèche dans les prochains mois des technologies d’automatisation et de robotisation est une évidence. Surtout pour ceux qui auront rafraîchit leur vision à moyen terme et qui auront accès à du financement. L’outil de production va ainsi devoir gagner rapidement en productivité pour être plus résilient mais aussi pour dégager de la valeur et renflouer les caisses. Comment allez-vous introduire les gains de productivité  sans opposer robot et humain ? Comment allez-vous surtout si cela accélère très vite et sans préparation. 

Voilà bien des questions !

Je vous laisse y réfléchir et me revenir avec vos commentaires et vos idées pour améliorer notre résilience organisationnelle.

4 vues0 commentaire
bottom of page