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Que fera le Big Data RH pour vous ?

Qu’il y a-t-il après les réseaux sociaux ? Le Big Data RH !

Encore une nouvelle mode que l’on oubliera dans 5 ans ? Une lubie de consultants ultraspécialisés qui n’ont aucune idée des réalités du terrain ? Pas si sûr ! Dans un monde digital qui se rempli de 8 nouvelles zettabytes de données chaque année selon ce que nous prédit IDC, le Big Data est un développement naturel de la puissance du digital.

Cette tendance est devenue le buzzword de 2013. La « Datafication » a contaminé toutes les conférences, les séminaires et les articles de l’année. Les plus influents nous annoncent tous l’arrivée du Big Data RH. Mais sur le terrain, c’est le scepticisme qui prévaut chez les professionnels débordés. Beaucoup de questions se posent sur l’utilité des données de masse en ressources-humaines. Alors, nouveau mirage l’Analytics 3.0 ?

Il y a a eu le web et l’email en 1995, le téléphone cellulaire en 2000, puis l’e-Learning en 2002, les réseaux sociaux en 2009, le cloud computing en 2010 puis le Big Data en 2013. Avant que l’année 2014 ne soit celle des Objets Connectés et du Real Time Marketing (je vous l’annonce en primeur !), arrêtons-nous sur le Big Data RH. En octobre 2012, comme beaucoup d’analystes, j’entrevoyais une évolution naturelle des fonctions RH vers l’analytique prédictive parmi d’autres tendances lourdes. Plus qu’un frémissement, le BigData est un signal fort. Celui de l’entrée dans un nouveau monde.

Bienvenue dans Data World !

Certes, à chaque mode, ce sont les mêmes comportements qui s’expriment. Tout d’abord les Early Adopters inondent le web d’articles passionnés et futuristes. Quand la pression devient médiatique, les réfractaires répondent que cela n’est qu’une mode et que cela ne fonctionnera pas bien au quotidien. La conférence du MIT avec Noam Chomsky le 15 novembre s’intitulait d’ailleurs « Big Data or Bad Data« . Puis, tranquillement, les premiers essuient les plâtres et les seconds tirent certains bénéfices et avantages compétitifs. Les derniers font du rattrapage et bénéficient des conseils des seconds. D’autres, ne pourront ou ne voudront pas voir que le Big Data RH est déjà une réalité. Elle gouverne une partie de notre monde. Pourtant, CEB indique dans son étude de 2012 que 77 % des professionnels RH ne savent pas évaluer l’impact du potentiel des salariés de leur entreprise sur ses résultats financiers. On part donc de loin avant de pouvoir faire du Big Data.

A l’heure du Cloud Computing, des Smartphones et des transactions numériques, négliger l’importance en RH du Big Data relève de l’ignorance. L’ajout d’une couche d’informations sur l’information est permise par les technologies digitales. Il s’agit d’une opportunité pour piloter stratégiquement les RH.

Au cours de la non conférence TruMontréal d’octobre 2013, j’animais avec mon ami Mathieu Laferrière un atelier qui fut un vrai focus group sur le sujet. L’auditoire attentif a soulevé un grand intérêt pour cette nouveauté. Mais il a aussi exprimé son besoin d’explications sur les usages et une préoccupation éthique à exploiter les données privées d’employés et de candidats possiblement discriminés sur des critères délicats.

L’émergence du Big Data dans toutes les industries

Selon une étude portant sur le Big Data des plus grandes entreprises des USA (Fortune 500), le cabinet conseil New Vantage montre que 85% des entreprises ont entrepris ou planifient de se doter de programmes de données prévisionnelles. En revanche, les enjeux sont surtout ciblés dans les ventes, le marketing, les opérations. Bref, on oublie un peu les RH.

Le Big Data a commencé avec le web et les moteurs de recherche, les transactions bancaires électroniques, les organismes publics, les jeux vidéos en ligne, les opérateurs de télécommunication, les transports, la géomatique, les réseaux sociaux, la recherche en santé ou encore l’astronomie. Avec l’inter-connexion des systèmes et des bases de données il est possible maintenant de cumuler en temps réels les mots, les données, les identités, les images et les transactions qui caractérisent tous les comportements entre les hommes et les machines et entre les systèmes. Nous sommes aux portes de l’intelligence artificielle. IBM a d’ailleurs lancé son supercalculateur apprenant Watson il y a déjà 4 ans.

Les outils d’analyse de données intègrent et traitent toutes les données ! Que ce soient les données web (Web Mining), les données texte (Text Mining), les images ou les vidéos (Image Mining), les commentaires, les twitts et les Likes (Sentiment Analysis) ou les données publiques (Open Data). La reconnaissance sonore et vocale, la reconnaissance de mouvements et de visages ou de données biométriques permettent d’ajouter l’identification des individus. Ce que fait Shazam pour la musique, il le fera pour les objets à la télé pour vous diriger vers le eCommerce. Ce que l’Iphone 5S fait avec votre empreinte digitale, il le fera avec votre visage pour autoriser les paiements. Le stockage de données infonuagique (Cloud Computing) permet maintenant un stockage illimité. Plus loin encore, les Google Glass ou les montres connectées (Wearable Devices) préfigurent ce que les objets pourront générer comme informations quotidiennes sur notre interaction avec le monde et sur notre biologie. Nos comportements vont parler !

Toutes les conditions sont donc en place pour exploiter l’Infostorm en traitant le bruit pour en dégager les signaux, puis les renseignements utiles, puis l’intelligence d’affaires pour conclure sur des décisions.

Big Data, Little Data ou Smart Data ?

Il est important de bien clarifier de quoi l’on parle derrière les effets d’annonces. Au fur et à mesure que le concept de BigData se précise, le langage clarifie les usages.

  1. Le Big Data est réservé aux propriétaires de gigantesques bases de données acquises avec des applications, des systèmes et le web. Ces données sont aussi générées par des flux ininterrompus.

  2. Le Little Data correspond davantage aux usages d’organisations qui traitent leurs opérations avec un volume de données relativement plus petit mais toujours aussi variées.

  3. Le Data Analytics, le Predictive Data ou le Smart Data sera davantage la cible des RH pour traiter des données à une plus petite échelle.

  4. Le terme Business Intelligence (BI) quant à lui réfère aux connaissances et aux décisions prises sur la base des données descriptives et d’analyses de données croisées.

Pourquoi les RH se tournent vers le Data qu’il soit big, little ou smart ?

1- Plusieurs usages du Data Analytics

  1. Identifier les variables explicatives et les comportements des employés –  Quelles variables expliquent la performance d’une unité d’affaire ou d’une équipe ? Quelles variables expliquent les statistiques obtenues en santé, en sécurité, en absentéisme, les plaintes clients, la fidélisation des clients, les ventes ? Quels profils et quelles compétences prédisent le mieux la fidélisation d’employés et la performance des employés et des candidats ? Quels managers génèrent les meilleurs résultats en terme de civilité organisationnelle, de résolutions de conflits, de règlement de plaintes, de satisfaction au travail, de promotion ou de départ ? Quelle initiative de formation a eu le meilleur impact ? Quelles statistiques influencent le plus la profitabilité et la croissance de l’entreprise ?

  2. Visualiser les données pour voir clair –  Que ce soit un Graph ou une cartographie, les données et les variables corrélées se présentent très bien sous forte de tableaux, cartes et dessins. Comme le montre le site visualizing.org, il n’y a pas que Facebook Open Graph et Linkedin Social Graph pour nous donner une idée visuelle de la complexité.

  3. Recruter par affinité – Gild propose de mettre en adéquation les compétences techniques d’analystes programmeurs avec les descriptions d’emploi des start-up et des firmes technologiques sur la base de 300 variables. Son algorithme calcule les affinités pour devenir un « Match Maker ». Le site Bright for Recruiters prétend également au même statut scientifique du Job Matching. Le recrutement n’est pas facilement modélisable car il est multifactoriel. Mais l’analyse sémantique des CV et des descriptions de postes peut rapprocher l’offre de la demande en calculant les proximités et les convergences. Comme le décrit le New-York Times dans son article, la concurrence de Gild sur le recrutement spécialisé est émergente mais promet un recrutement plus rationnel. Finies les agences de recrutement ?

2- Des usages avancés en Predictive Data

  1. Établir des scénarios décisionnels,

  2. Mesurer les impacts de décisions,

  3. Prédire les résultats et les comportements futurs des employés, clients et candidats,

  4. Personnaliser les services RH selon les variables clés.

3- Toute une industrie trouve de nouveaux gisements de croissance dans le Big Data RH

a) Les sites web RH en première ligne.

Les Jobboards comme eQuest, CareerBuilder Big Data Analytics ou Monster SeeMore proposent d’élever leur offre de service en allant chercher de la valeur ailleurs que dans le simple affichage de postes. La valeur est maintenant dans les données sur les visites de fréquentation, les types de candidatures, les taux de clics temps d’affichage pour combler des poste. eQuest propose ainsi toute une gamme de services basés sur les données prédictions. Monster SeeMore propose de gérer tout votre bassin de talents pour mieux faire des recherches sémantiques sur les talents disponibles et dégager certains indicateurs. CareerBuilder propose aux recruteurs de mieux gérer leur affichage d’offre d’emplois et d’optimiser leur recrutement en fonction du bassin de candidats et des historiques de recrutement pour le même poste.

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=4zAQ6dB5Vrc&w=560&h=315]

Plus surprenant, le site de rencontre eHarmony qui cherche les correspondances entre deux profils amoureux se lance dans le Job Matching. Fort des 4% des mariages célébrés aux USA par an, son fondateur le Dr Neil se lance dans le Smart Data du marché du recrutement.

b) Les Talent Management System (TMS) se mettent en file. 

Les éditeurs de solutions de gestion des talents offrent aux entreprises les occasions d’intégrer facilement les analyses de données dans leurs systèmes (ATS, LMS, TMS). WorkDay propose une solution Big Data. Sum Total System ElixHR  propose d’avoir un tableau de bord avec des données RH. Kenexa d’IBM propose avec SmarterWorkforce des données prédictive du talent pour cibler les meilleurs candidats. 

Les responsables formation pourront aussi utiliser la datafication en analysant les données du e-Learning, m-learning et des programmes de formation .

c) Les application en recrutement se démarquent. 

Plusieurs applications en ligne cherchent à modéliser les profils de compétences et à faire les rapprochements entre les candidats et les emplois. Avec 200 millions de profils sur LinkedIn, l’application Recruiters propose à ses clients corporatifs l’option “People You May Want to Hire.” basée sur des algorithmes complexes d’adéquation.

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=_O3VZq1KX3U&w=420&h=315]

d) Les éditeur de tests et de solutions RH cherchent un nouveau souffle.

CEB (ex SHL) propose SHL Talents Analytics pour benchmarker les talents de votre organisation avec ceux d’une base de données de 80 millions de participants testés.

De son côté, Hogan Assessment, CPP ou Pearson proposent selon le standard du marché des études de validité de leur outils d’évaluation sans s’aventurer sur les terrains connexes des données de masse.

e) Les compagnies informatiques prêtent à vous aider. 

Les compagnies de services informatique et les fournisseurs de services de stockage Cloud visent un marché du conseil pour aider les clients à intégrer leur systèmes corporatifs (ERP, CRM) et RH (SIRH, TMS, ATS, LMS). Les plus grandes firmes informatiques telles que SAS ou IBM Infosphere proposent des solutions Big Data dans leur portefeuille 2014.

f) Les cabinets conseils RH demeurent encore attentifs. 

Le marché des Smart Data est une marché naissant et de pointe. La plupart des RH d’entreprises continuent de gérer avec peu de moyen un grand nombre d’enjeux. Si le buzzword est phénoménal, la réalité du terrain nous conduit à un constat de faible demande et de non maturité du marché. Comme l’évoque Andrée Laforge dans son billet, il faut que les RH plongent maintenant pour avoir des indicateurs. Oublions les perspectives du prédictif pour encore un certain temps.

Big Data RH, un avantage stratégique à bâtir.

Maintenant que l’on vient d’évacuer la question du « Quoi », parlons du « Comment ».

1- Développer les compétences en mesure et traitement de données

Les compétences en mesure et en données analytiques vont devenir clés pour les organisations et les RH. Ces compétences sont sous-jacentes à toutes les planifications stratégiques, à tous les investissements et seront indispensables pour mesurer le retour sur investissement, le ROI. La fonction RH sera logée à la même enseigne que le département Ventes et Marketing ou les départements d’opérations.

Voilà pourquoi les emplois de Data Scientists et d’autres analystes de données sont devenus les plus sexy selon Harvard Business Review ! Comme le souligne Thomas D. Davenport dans l’étude de NewVantage :


There is a storm approaching on the Big Data talent front; 70% say they plan to hire data scientists, but they already find this “challenging” to “extremely difficult,” and there is no reliable source of new talent in this category.

2- Collecter des données ou travailler avec ses fournisseurs

Pour démarrer, il faut mettre en place un inventaire de données et un plan de mesures et de collecte de données. Par la suite, ces données sont traitées en indicateurs et tableaux de bord. Ces données descriptives sont une première étape. Les partenaires et les fournisseurs (ATS, TMS, SIRH, Agences, Éditeurs de tests et formation, Évaluateurs,) sont des interlocuteurs clés à cette étape car ils possèdent des données liées à vos transactions et activités.

Pour identifier des variables, il faut cumuler des données et les traiter statistiquement. Pour être en flux dynamique (une autre difficulté à surmonter), il faut connecter les systèmes et assurer une cueillette et des traitements automatisés en temps réels. Le plus souvent, pour débuter, les entreprises font des analyses avec des données fixes.

Les prédictions et l’intelligence décisionnelle prend en suite en compte les données descriptives et les variables avec une analyse qualitative et quantitative de ces informations.

Comme le montre fort bien Bersin Deloitte, dans le domaine RH, la base des données prédictives sont les données d’opérations, les tableaux de bords et les indicateurs de performance puis les analyses de données.


Bersin J (2012) Maturity Model.

3- Traiter les données

Pour traiter les données en statistiques, plusieurs logiciels existent. Apache Hadoop est un logiciel développé pour traiter un grand volume de données variées. Pour l’utiliser rapidement, certaines compagnies offrent des services de type plateforme clé en main comme Cloudera. De même Google propose Google BigQuery avec son service d’hébergement cloud. Alteryx propose aussi un logiciel de traitement.

Plus proche de nous et plus facile à trouver comme compétence, il y a le logiciel IBM SPSS Modeler qui se dote d’un module Big Data pour faire un traitement multimodal de données.

Et puis il y a la visualisation des données. Plusieurs outils en ligne sont disponibles : ZoomInfo, SAP Lumira, Tableau Software.

4- Exploiter le Smart Data stratégiquement

Il n’y a pas de projet Smart Data sans la volonté de la direction générale car le projet demande une vision et de l’énergie devant la complexité pour mettre en place le Big Data.  Les connaissances scientifiques de traitement statistiques sont requises pour faire un plan cohérent de collecte et d’intégration de données provenant de plusieurs systèmes. Les conclusions et les informations de l’Analytics 3.0 comme le titre Thomas Davenport dans le numéro de décembre 2013 de HBR peuvent devenir sensibles. Leur manipulation et leur interprétation sont délicates et nécessite un chef de projet méthodique qui présentera les informations et qui accompagnera leur interprétation lors de planification stratégiques et de décisions.

Vous voilà fin prêts à exploiter le gisement de données de vos employés et candidats.

Pour aller plus loin

  1. Josh Bersin  (2012) Big Data in HR: Building a Competitive Talent Analytics Function – The Four Stages of Maturity

  2. Thomas Davenport (2013) Keeping Up With the Quants Your Guide to Understanding and Using Analytics

  3. Jean-Paul Isson (2012) Win with Advanced Business Analytics: Creating Business Value from Your Data

  4. McKinsey (2011) Big Data: The next frontier for innovation, competition, and productivity

  5. International Institute for Analytics

  6. John Sullivan ERE (2013) Actionable Predictive Analytics — the Next Big Thing in Talent Management

  7. eQuest Blog : Floating Point blog dédié au BigData RH

  8. Note du Commissariat Général à la Prospective Économique du Gouvernement français (vidéo) 

  9. Mathieu Laferriére (2013) Big Data RH, que peut-il faire pour vos recrutements ? 

  10. Andrée Laforge (2013) La mesure RH, il faut plonger MAINTENANT. 

  11. Pour se former à l’exploitation de données : HEC Montréal microprogrammeCarnegie Mellon Master.

  12. Mon article (2012) Les prédictions RH 2012-2013 : le BigData RH. (initialement publié en octobre 2012 sur le site de SPB Psychologie organisationnelle).

  13. Mon article (2013) Les indicateurs de performance RH, point de départ du BigData RH.

Les cartes tendances

Note : Ce billet est réguliérement mis à jour en raison de l’abondance des articles et nouvelles scientifiques liées à cette tendance lourde. Dernière mise à jour : 09/12/2013

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